Consigne : mêler les jours de la semaine, avec les échelles et les escaliers pour offrir un texte progressif qu’on illustrera en partie ou en totalité.
Lundi : Entre la rue Daudet et celle de l’épervier, presque 4 sur l’échelle de Richter
Je tourne au coin de la rue, et là patatra
Les corps se rencontrent et rebondissent
Vous allez bien Mademoiselle ?
Je suis pris dans son parfum
Comme dans un rêve en apesanteur
Je n’entends rien de sa réponse
Perdu dans l’ébène soulignant ses yeux
Et la danse de ses lèvres cramoisies
Je suis sans le mot,
Deux courbettes et pif, paf, pouf
La poudre d’escampette.
Mardi
Je fais attention.
Je tourne,
Rien
Me retourne,
Rien non plus.
J’y ai pensé toute la journée,
et maintenant j’y pense encore.
Dans mon cœur, une peine surprenante.
Un manque insondable.
Il n’y a pas d’échelle assez longue.
Pour l’explorer, une frontale et une corde à nœud.
Mercredi
Le coin de rue est toujours vide d’elle
Même pas mal !
De l’infiniment grand à l’infiniment petit.
Renversement d’échelle.
Je me gausse de mes élans adolescents.
Puis le soleil s’enfuit
Une bière sifflée tout en bas de l’escalier
Je me dit « et si ? »
Espace déserté
Fertilité du vide
Entre les extrêmes je me laisse glisser.
Pendant un instant je crois sentir son odeur
Le cœur agité je regarde de tous les côtés
Mais ne voit que la nuit qui m’a enveloppé
Jeudi
Je fonce
Je tourne
Peut-être que j’imagine
Que ça va la faire venir
Qu’elle est le fruit d’une intensité
Mais encore une fois le virage ne donne que sur des passants
Que mes peines laissent complètement indifférents
Alors, porté par mon élan j’avance
oui j’avance encore
Mais lesté par mon cœur enroué, pour combien de temps ?
Une main dans sur mon épaule
Je me retourne, mais ne voit rien
Rien ne m’a touché
J’ai dû rêver.
Poings dans les poches prêt à me retourner
Au loin, elle
Mon regard croise le sien
Le pas enjoué
Ma langue autrefois plombée,
au vif argent a viré
Un cœur de pierre philosophale
Son sourire est mon saint Graal.
Le noir bordant ses yeux ma religion.
Je décolle.
Vendredi
Première sortie en amoureux
Loin de la ville mais j’imagine
Qu’alors que nous nous élançons vers le moulin,
Alphonse de son petit nuage nous sourit.
Une balle de foin éventré
Un tapis pour s’amuser
Envolées les longues années
Les articulations oublient de grincer
Montée de sève et rêves adolescents
Même l’échelle de meunier ne me fait pas peur
Et là : pa
Ta
Tra
Pif
Paf
Pouf
Mais rassurez-vous, on n’est que vendredi
L’histoire est loin d’être terminée
Samedi
Mes témoins hissent mon fauteuil roulant jusqu’en haut des escaliers
Je rentre dans la maison du seigneur sur des chapeaux de roue
Non, non , non
Un peu de sérieux et de respect
Non, j’y rentre avec mon chapeau sur les genoux.
Même plâtré et broché je me sens léger
C’est le plus beau jour de ma vie.
Je suis un avec mon ange.
Dimanche
Jour du seigneur
Les années ont passés et ma belle aussi
L’histoire tire à sa fin
Ma douce est loin
Ma douce sans doute coude à coude avec Alphonse
Je peux sentir son sourire, son doux sourire
Je peux le sentir me réchauffer le cœur
Quelque part Jacob et son échelle
Ça monte et ça descend
Ça annonce les bonnes nouvelles
Ça sèche les larmes des fidèles
Ça touche les cœurs et s’enfuit à tire d’aile
Un courant d’air, un dernier souffle
Un sourire léger, et pas un regret.
Joie et douceur, sourdent de mon cœur